Difficile d'écrire dans la situation présente. Surtout pour moi. J'ai tellement peur d'affirmer quoique ce soit si je ne sens pas que "j'ai tout à fait raison", que je préfère souvent le status quo. La situation n'est pas simple...
D'abord, concernant la rencontre de cet après-midi, c'est difficile de prédire si les prochains jours seront la fin ou une continuation de la crise.
D'une part, suite à la rencontre avec la CRÉPUQ et la Fédération des cégeps, le gouvernement pourrait savoir qu'il est maintenant au bord du gouffre. Que le gouvernement travaille seulement dans le but d'être ré-élu pour avoir le pouvoir ou qu'il travaille réellement pour la population du Québec, il doit agir selon l'opinion publique. Parce que s'il croit être la meilleure solution pour l'avenir du Québec (et donc être le seul parti qui doit gouverner), il doit tout de même faire la part des choses entre éliminer la hausse des frais de scolarité et, d'après moi, avoir de meilleures chances de rester au pouvoir, et forcer pour la hausse, ce faisant mettant le système d'éducation sens dessus dessous au Québec et suite aux conséquences négatives de cette décision avoir plus de chances de perdre le pouvoir dans quelques mois.
Je crois que politiquement, à ce point-ci, il est mieux pour les libéraux de faire un GROS compromis en vue des élections, parce que les électeurs libéraux continueront à voter libéraux malgré que le gouvernement reviendrait sur sa décision et que les indécis seraient probablement satisfaits si le conflit était réglé. Tandis que dans le cas contraire, et si des sessions sont réellement annulées, le gouvernement sera considéré comme n'ayant pas pu gérer la crise et alors, beaucoup de gens dans la population se tourneront vers d'autres partis politiques. Sans compter que toutes les allégations de fraude et corruption qui pèsent contre les libéraux vont être véhiculées bon train lors de la campagne électorale. D'après moi, donc, le gouvernement ne peut, à ce point-ci, qu'espérer régler la crise rapidement et ne plus se fier sur l'essouflement des étudiants dans ce bras de fer.
D'un autre côté, la situation n'est peut-être pas encore à minuit moins un. Il pourrait ici s'agir d'une dernière tentative par le gouvernement d'obtenir l'approbation de l'opinion publique en se montrant "raisonnables" et en mettant de l'eau dans leur vin puis en montrant à la population toute la "mauvaise volonté" des étudiants qui n'ont pas annulé les manifestations et auront possiblement fait un peu de grabuge à Victoriaville, ce qui sera fortement véhiculé dans les médias. Cependant, la tactique ne s'est pas montrée fructueuse jusqu'à présent. Est-ce que le gouvernement oserait tenter le destin en annulant certaines sessions de cégep pour faire peur au reste de la population étudiante? Ça reste une possibilité, mais le résultat de cette tentative est plus qu'incertain puisque la volonté de nombreux étudiants reste ferme. Sans compter que malgré l'annulation de sessions au cégep, il est peu probable de l'annulation de sessions universitaires. Que faire si les universités restent en grève? Bref, cette voie est assez risquée.
Personnellement, je m'inquiète de moins en moins de l'issue des prochaines élections. Grâce à toutes les discussions, toute la littérature accessible, j'en suis venue à réaliser que peu importe le parti au pouvoir, il n'y a pas de perfection. La seule façon de changer une société est de rendre une population impliquée dans les décisions qui la concernent. C'est de l'intéresser à opter pour autre chose que le status quo. L'atteinte du bonheur et la visée d'un certain confort et d'une certaine paix ne sont pas de mauvaises choses en soi. Mais par contre ces dernières, si elles ne sont pas liées à un sentiment d'"empowerment" (je ne connais pas le bon terme en français) des citoyens dans le futur de leur société et leur futur personnel, laisseront les gens amers et cherchant toujours à combler un certain vide par d'autres moyens que la prise en mains de leur vie (consommation de biens, de travail, de drogues et d'autres moyens d'"échapper à la réalité").
Selon moi, il est donc très positif que les étudiants soient dans la rue, se questionnent, remettent en question, se radicalisent, prennent position. Les leaders de demain, déjà, auront été confrontés à des idées qui ne prennent pas pour acquis que l'économie doit être au centre des décisions. Que les gens doivent être au centre des décisions. Parce que l'économie devrait exister pour les gens. Les gens n'existent pas pour faire tourner l'économie. En ce moment, on ne voit pas encore les effets de cette grève sur la population en général. Effets qui n'auront pas un impact que sur la hausse des frais de scolarité. Dans les prochaines années, nous verrons aussi un effet sur la population. Qui se sera posé des questions, qui aura eu un regain de vitalité et d'espoir face à l'avenir de tous, Québécois comme habitants de ce monde. Et qui décideront peut-être de prendre leurs décisions davantage pour le bien commun qu'avant. Par exemple, comment espérer réduire la consommation de biens et d'énergie des individus et les amener à prendre de meilleures décisions de consommation sans pour cela forcer les gens à le faire? Il faut qu'ils aient envie de le faire en sachant qu'ils participent au mieux-être de l'environnement et des générations futures. Il faut surtout que les gens prennent ces décisions eux-mêmes et se valorisent eux-mêmes et au sein de leur communauté par les choix positifs qu'ils font. Et de mettre ce cynisme de côté, de savoir que nous prenons des décisions ayant des impacts positifs, c'est ÇA qui va faire que nous aurons un réel sentiment de bonheur et que la "vie a un but". Un genre de remplacement de la religion d'autrefois par une conscience individuelle du pouvoir que nous avons de rendre les choses meilleures.
Et c'est ce qui est le plus beau d'après moi dans toute cette histoire!